Une traversée du pacifique, pacifique à demi

C’est 32 jours qui se succèdent, 32 jours qui ne se ressemblent mais sont tous un peu les mêmes. 32 couchés et de levés de soleil  à quelque chose près, 32 ambiances, de trains de vagues à calmes plats, crachins bretons ou grains tropicaux, nuits paisibles ou sommeils agités. un corps qui s’adapte, réagit, gronde, et se soumet à l’élan de la mer répercuté sur la coque de Yara.

Des tremblements dans la nature, des pièces qui lâchent des voiles dissipées, des cordages emmêlés mais qui finalement se disciplinent afin de nous emmener sur le grand océan.

Des livres avalés, le rituel du soir, une série « Black Sail » pour rester dans l’ambiance, avant le 1er quart de nuit.

De longs moments de rêverie au fil du ciel qui nous encercle.

Des oiseaux, un chaque jour, si loin des terres.

Un éblouissement devant  la faune tranquille et sauvage des Galapagos, venue en nombre à notre rencontre. Et la bêtise humaine aussi dans cet archipel qui n’est plus un patrimoine que pour une infime partie de l’humanité.

Mais fî des tracasseries terrestres pour le moment seuls comptent ce petit navire perdu dans l’immensité et ces 2 occupants. Il a tenu promesse.

Cependant l’arrivée nous préoccupe. Pas tellement en ce qui concerne l’approche du lagon mais la question suivant nous taraude : allons-nous reprendre goût à cette vie « civilisée » ?

   

Nous étions si bien mer! Et puis la découverte de cette nouvelle terre des Gambier si étrange et belle, avec mérou en prime à l’entrée du lagon nous ravit. Et on est heureux de partager avec les équipages qui nous ont précédés ce bonheur, cette excitation de l’arrivée et le calme enfin retrouvé.

                                     

Les Perlas

Sur la route du pacifique, nous quittons enfin Panama City.

Un mot sur cette ville qui n’exciterait pas sans le canal et son trafic perpétuel où les mégas tankers se délestent uniquement de milliers de dollars en droit de passage et sans le blanchiment d’un autre trafic…

Citée grouillante et orgueilleuse dans sa volonté de copier les plus grande. Ici les buildings sont vides et déglingués bouffés au sel et nourris à la poudre.

Contrastant avec cette image plutôt négative et la corruption ambiante, le plus chaleureux des accueils, bras ouverts, nous fut réservé par Monique et Claude résidents français depuis plusieurs années.

Le trio Albin, Véro, et Denis découvrent d’autres facettes plus positives de cette ville grâce à Claude qui nous a véhiculés aux quatre coins de la city et a grandement facilité notre avitaillement en prévision des 6 mois à venir.

Au mouillage face à la City, la tribu des futurs voyageurs du pacifique se forme autour de quelques apéros bien ballotés.

Albin pcr en poche, rejoint les pays de l’est  entre 2 confinements. Une fois les derniers tracas avec les autorités réglés zarppé ou not zarppé !, Yara présente son étrave dans les eaux enfin claires des Perlas.

Dès la sortie de la baie de panama, laissant dans notre sillage les gros tankers et un ciel chargé de particule fine, les lignes de traine sont en fonction prêtes à accueillir tous les poissons suicidaires mais aucun candidat se présentera et pourtant les leurres bleu d’azur sont séduisants.

Heureux de retrouver la quiétude de ces iles pour la plupart déserte.

La préparation de Yara et de son équipage pour leur plus grande traversée de leur périple, le double de la transat, est affinée nettoyage de la coque, réglage du safran, derniers contrôlés moteur, appareils électroniques, analyse de la météo et des routes à suivre.

Quelques bananeraies et papailleraies abandonnées lancent un dernier appel à la cueillette.

10 mars au matin, le cœur serré, de concert avec nos amis du Pourquoi’pas, Yara se lance pour 4000 milles dans la transpacifique, cap sud ouest, avec le passage de l’équateur, peut-être une escale aux Galapagos et une arrivée prévue aux Gambier : durée estimée 30 jours

Pas de boa constrictor mais un alligator..

Tout a commencé par une nuée de mouches et de moustiques à Curaçao. Accueil piquant mais pas surprenant.

Bien plus tard sur le continent sud americain les singes hurleurs se cachent en forêt vierge mais ne restent guère discrets pour autant. Leur cris font dresser le poil à qui les surprend. Beaucoup plus curieux et chahuteurs seront les petits ouistitis alors qu’une mère paresseuse et son petit nous feront l’honneur de leur discrète présence dans le tunnel de l’amour.

 

Tandis qu’un peu plus loin un gros croco aime à se dorer la pilule sur les bord du canal, une iguane choisit de se pavaner sur les trottoirs de Panama.

De tout temps, le colibri du jardin de Monique butine, pendant que les roussettes de Claude font leur tournée nocturne.

Le requin dormeur le fit au pied de son récif San Blasien, alors qu’un pelican des plus culotté s’intéressait de très près à notre marque de moteur .(!)

Les dauphins tachetés nous saluèrent pendant que des raies s’envoyaient en l’air au dessus du Pacifique.

Une petite tortue curieuse s’approchât dangereusement mais sans crainte de notre appât, de même un fou de bassan aux pieds bleu (sûrement un aristo, il en existte aux pieds rouge) surveillât du coin de son œil gris la manœuvre de spi, tranquillement installé sur le balcon avant.

Ce fut par une belle matinée de Mars qu’une nurserie de coeruleoalbas fit ses premiers sauts à notre tribord alors qu’une nuit plus loin, si près de l’équateur, de puissantes baleines nous réveillèrent, baptisant le bateau de leur souffles puissants.

Une multitude d’oiseaux nous survolent, navrés que nous sommes de ne pouvoir les identifier tous. Il nous faudrait pour cela une encyclopédie volatile.Sur l’étendue lisse du Pacifique une armada de dauphins noirs s’avance, tous de front, en effectuant sa meilleure voltige. Poissons volants et calamars quant à eux s’écrasent chaque nuit lamentablement sur le pont.

Nous aurons eu notre quota de bestioles avant même d’arriver aux Galapagos . Mais irons nous , irons nous pas ?

Si près de  » l’origine des espèces  » et passer loutre , ça va pas être possible ! Un crochet d’une centaine de miles et nous voilà dans le fameux parc national, patrimoine de l’humanité. Et c’est un festival! La danse de l’otarie nous enchante. Une puis deux tortues nous rendent visite, si près du bateau quand au loin les baleines à bosses vaporisent l’azur d’ une brume marine. Les émois amoureux des raies se mesurent à la hauteur de leur saut et elles sont très amoureuses !

Nous verrons peu des Galapagos même si sur Isabella les iguanes terrestres nous ont observés de leur yeux globuleux et le jeu des jeunes otaries nous aura conquis le temps d’un débarquement éclair …

 » Seules les bêtes » me direz vous ont mérité notre respect !

La marée chaussée, l’aéronavale, capitaine et agents en tout genre ont décidé que nous ne mettrions pas pied à terre. ( sauf à se délester de la modique somme de 1500 dollars)

Et oui Darwin le monde a bien changé !

Votre honneur nous fera la grace cependant d’un filet à provision avant un appareillage immédiat, mais point de gazoil pour nos reservoirs.

Que nenni,! Faisons route ! Une troupe de globicéphales nous attend au large pour égayer l’inexorable pot au noir.

 

Histoire d’un canal à Panama

Oh Susy si tu savais tout le mal que l’on me fait

Avec ton air d’agent latino-américain franco-panaméene, à peine debarqués tu nous as liberés.

Nous étions libre de fouler le sol de Panama au milieu de la mangrove et des singes hurleurs, libres de se frotter aux autorités avec notre liasse de photocopies.

Oh Susy si tu savais tout le mal que l’on me fait

Tu expliques le canal, les sommes à payer, jamais tout à  fait nettes de taxes et de commissions, plus de 2700 dollars quand même !

Oh Susy si tu savais tout le mal que l’on me fait

Tu nous donnes rendez-vous avec le jaugeur, voire le arpenteur le 15 au matin au flat, plutôt le cimetière des bateaux sans nom. Le 15 tu nous dis: c’est reporté au 16. Shelter sera pour quelques jours notre camps de base.

22 matin ou soir passage prévu. Finalement les handliners et le pilote embarquent à 16 heures sans gants ni chaussures mais masqués, avec des pneus sans attache et des haussières raides comme la justice. En 2 minutes c’est le branle bas combat, il faut lever l’ancre et gagner le chenal sans tarder, un cargo attend.

Bref tout est paré, chacun à son poste prêt à affronter les premières écluses, à recevoir les premiers lancés de toulines.

Très professionnels nous passons les 6 écluses et la traversée du lac Gatun avec une synchronisation parfaite, une vraie chorégraphie.

Nous voilà après 24 heures dans le pacifique, nos équipes nous quittent à Balboa, nous quémandent 12 dollars supplémentaire. Pourquoi? juste pour débarquer.

Oh Susy si tu savais tout le mal que l’on me fait

Et le crusing permit ? Pas la peine et puis si si je m’en occcupe ça fera 185 dollars plus 30 de commission pour faire la demande.

Un mois passe, toujours pas de permis pourtant obligatoire pour sortir de Panama.

Discution, contreverse, atermoiements , avec toi et Iasmina des autorités. Encore un petit effort de 5 dollars et l’imprimante accouche du permis. Nous sommes enfin libérables

Oh Susy si tu savais tout le mal que l’on me fait

Plus un pays est corrompu plus compliquées sont les procédures. Mais tu nous as libéré des paperasses administratives. Quoique!

Oh Susy si tu savais tout le mal que l’on me fait peu à peu tu disparais